
Beleth (Harvey Lawrence)
Identité
Caractère
Calme ~ Pragmatique ~ Incorruptible ~ Sadique ~ Réservé ~ Obéissant ~ Inexpressif ~ Insensible.
Au Mystic Swan

Histoire
Franchement, qui ça intéresse la jeunesse d’un gamin ayant grandi dans une famille britannique aisée, qui a suivi l’enseignement dans des écoles privées et dont la voie toute tracée par ses géniteurs devait le mener tout droit vers la réussite parmi les traders de la City ? Si c’est votre cas, vous me faites presque de la peine. Je dis presque parce qu’en réalité, j’en ai rien à foutre que vous n’ayez rien de plus bandant dans votre vie qu’à lire la tristement banale histoire d’un gamin londonien. Je passerai donc la médiocrité de mes jeunes années pour me concentrer sur ce qui m’a mené ici, à exercer mon art, dans les ténèbres du Purgatory, à l’abri des regards, bien que tout le monde sache parfaitement ce qu’il s’y passe. C’est le gage de tous les maîtres, on connait leur nom, leur oeuvre, sans qu’on ai jamais vu grand-chose d’eux. Enfin, pour ceux qui ont la chance de ne pas y avoir mis les pieds pour s’y faire corriger.
Comment je suis arrivé ici ? C’était pendant mes études en Économie et Marchés (ce nom pompeux pour dire qu’on apprend à lire des courbes sur un écran d’ordinateur et qu’on les manipule pour faire perdre ou gagner de l’argent). J’avais une vie peinarde, une copine qui était de bonne famille, mais pour laquelle je n’éprouvais rien. Non pas qu’elle n’était pas bonne à aimer, tout le contraire. N’importe qui aurait voulu l’épouser. Moi je la trouvais fade, lisse. Tout était banal avec elle, comme si on était sur des rails et que l’on allait suivre les arrêts obligatoires du petit train de la vie : les fiançailles, le mariage, la maison, le marmot, le clébard. C’était du pilotage automatique. Pour tout. Et quand je m’aventurais à essayer d’assouvir certaines de mes envies, elle s’en choquait, même pour une petite fessée dans la cuisine. Et elle faisait la gueule pendant des jours. Si elle savait ce que je voulais lui faire…
Je me faisais donc chier, y a pas d’autre mot. Dans mes études, dans ma vie en générale. Et un soir dans un bar (c’est souvent un soir dans un bar que ça dégénère, comme dans un mauvais film), un gars voulait en venir aux mains, soit disant que j’avais regardé sa pouffe de travers. Il avait certainement un truc à vouloir compenser dans le pantalon, comme en attestaient les regards langoureux -qui étaient destinés à tous sauf à lui- de la blonde pulpeuse qui l’accompagnait. J’ai laissé le gars en sang, gisant sur le béton du trottoir devant l’entrée du pub. J’avais pris mon compte aussi, je vais pas vous le cacher, mais au moins je tenais debout alors que lui avait rejoint la Belle au bois dormant. Je me rappelle que je ne sentais pas la douleur à cet instant, ou plutôt que j’étais trop enivré par l’adrénaline du combat de coq auquel je venais de m’adonner pour y prêter attention. J’avais adoré le frapper, lui faire mal, lui péter les dents, le nez, qu’il se souvienne à jamais la raclée que je lui avais mise. Ce petit con. J’en ai ri, je crois bien.
Et puis je suis retourné à l’intérieur, finir ma pinte. Tout le monde me dévisageait maintenant. Comme si Moïse avait ouvert la mer en deux, sauf que moi c’était un gars, et qu’il était encore entier, si l’on pouvait dire. Mais en fait, c’était pas ça. J’avais eu l’intelligence d’échanger des politesses avec le neveu d’un mafieux londonien, justement présent ce soir-là, au pub. Les regards craintifs et fuyants, ils auraient dû me mettre la puce à l’oreille. Est-ce que je flippais à ce moment-là ? Non. J’étais persuadé de pouvoir lui faire sa fête à lui aussi, ainsi qu’à ses gorilles. J’avais quelques verres dans le sang, voyez-vous. Le gars m’a accosté, en faisant crisser un tabouret sur le parquet lustré de son pub. “Tu l’as bien amoché le petit gars,” m’a-t-il dit. “Vous voulez la même ordonnance, le vieux ?” Le temps s’est arrêté dans le pub. Littéralement. Puis il a éclaté de rire, celui-là même que j’avais eu après avoir pété les dents de son neveu. “C’est le fils de mon idiote de soeur. Elle est aussi dégourdie que lui, j’en viens à m’demander si elle est du même sang que moi. Tu fais quoi dans la vie, mon gars ?”
On a discuté, je crois, quelques heures. C’est lui qui a décelé le premier ce pourquoi j’étais doué. Il avait besoin d’un “comptable”, comme il disait. Je pensais que c’était à cause de mes études. Que dalle. Il avait bien compris que j’aimais faire mal, même plus vite que moi. Le lendemain, il me chargeait d’un petit boulot. Y avait un petit magasin de la banlieue de Londres qui estimait qu’il avait pas besoin de protections. Le propriétaire, il mange maintenant avec une paille. Pour dire vrai, j’étais trop expéditif à l’époque, je prenais pas assez mon temps, mais qu’est-ce que je kiffais faire ça. Le soir-même, je rentrais à l’appart, plaquais ma copine sans une explication, et je me cassais, sans rien.
Et j’ai passé la meilleure nuit de débauche de toute ma vie. J’ai bu, fumé, snifé, avalé tout ce que je trouvais. Je me rappelle m’être réveillé dans un motel miteux, avec deux nanas et un gars complètement nus dans le lit. Honnêtement, je me rappelle pas bien de tout si ce n’est de moi rampant comme un ver de terre jusqu’aux chiottes pour dégobiller tout ce que j’avais ingurgité les dernières heures. J’avais l’impression que le troupeau de gnous m’avait piétiné moi et pas Mufasa. Et qu’ensuite on avait mis ma tête dans le tambour d’une machine à laver. J’avais un mal de crâne carabiné. Mais je me sentais vivant. Pas d’avoir baisé, de m’être mis la tête à l’envers, mais d’avoir trouvé ce que j’aimais faire : faire souffrir physiquement les gens, dans un premier temps. Puis, plus tard, j’ajoutais la corde de la souffrance morale à mon arc.
Les années suivantes, j’excellais, vraiment, et je perfectionnais mon talent pour obtenir tout de n’importe qui. Du blé, des aveux, des infos, n’importe quoi. Je rendais service à droite à gauche pour celui que j’appelais “affectueusement” mon oncle. Il était de la famille, même si tout ça, c’était de bien grands mots, lui ou un autre, c’était presque pareil. En réalité, comme il m’avait mis le pied à l’étrier, je lui étais fidèle, je bossais surtout pour lui quoi, même si je m’autorisais quelques piges pour d’autres organisations. Ça permettait de se faire des contacts utiles un peu partout. D’ailleurs, c’est comme ça que le MS m’a approché. Je savais pas trop ce qu’il s’y passait dans cet hôtel curieux, mais on m’offrait de me payer grassement pour corriger des gens.
C’était pas de la correction qu’ils demandaient en réalité. C’était no limit. Je pouvais faire tout ce que je voulais, sans impunité. Y en a, devant le champ des possibles, ils sont tétanisés. Moi, je vois une toile blanche qui n’attend que mes coups de pinceau pour devenir une oeuvre d’art. Sauf qu’à la place de toiles, j’avais des employés récalcitrants, des résidants qui chiaient sur les règles, et les couteaux remplaçaient les pinceaux. J’ai diversifié mon attirail d’outils avec le temps, mais j’ai toujours aimé la froideur des lames. On est tellement similaires elle et moi.
Et puis, mon oncle s’est fait dessouder. C’était devenu tendu à Londres et le MS, il m’a proposé un job à temps plein, une belle porte de sortie. C’était le paradis de la débauche et honnêtement, j'en avais rien à foutre de ce qui s'y passait. Ce qui m'intéressait, c'était qu'on m’offrait les clés des enfers. Pour y régner.
Vous croyez quoi ?
Bien sûr que j’ai accepté.
HRP

Mystic Swan